Le merchandising a changé de visage, mais pas son objectif. Qu’il soit statique sur carton plume ou dynamique sur écran LED, l’enjeu reste le même : capter l’attention à un moment décisif et transformer une intention flottante en acte d’achat. La question se pose avec acuité dans des points de vente toujours plus fragmentés, où l’on jongle entre retail de centre-ville, corners en GMS, pop-up stores et réseaux de franchises. Faut-il basculer vers la PLV digitale, rester sur des supports physiques, ou composer une orchestration hybride? Derrière le débat se cachent des différences concrètes de coûts, de maintenance, de vitesse d’exécution et d’efficacité sur le terrain.
Où la PLV fait vraiment la différence
Dans une allée de grande distribution, une affiche imprimée avec une offre claire peut faire monter la vente unitaire de 10 à 30 % sur une courte période, surtout quand l’élan d’achat se joue en moins de quatre secondes. D’un autre côté, un écran bien placé, avec des contenus animés courts, peut tripler le temps de fixation, ce qui est déterminant pour les catégories où la différenciation produit est faible et le linéaire saturé. J’ai vu une marque de boissons sans alcool, pourtant noyée dans un rayon dense, passer de 2,1 à 2,8 unités vendues par magasin par jour lors d’une campagne de 6 semaines, simplement en alternant un stop-rayon imprimé et des vidéos de 8 secondes sur un petit écran batterie. Deux dispositifs différents, deux mécaniques différentes, mais une combinaison efficace.
La PLV se gagne sur des détails: angle de vision, lisibilité à 2 mètres, contraste, rythme des animations, tenue des fixations, rigueur des remontées terrain. La technologie ne remplace pas la connaissance du point de vente. Elle l’amplifie quand elle est utilisée avec discernement.
Ce que recouvrent “PLV digitale” et “PLV traditionnelle”
Par PLV traditionnelle, on entend l’ensemble des supports imprimés et non-électroniques: affichettes, kakemonos, totems carton, glorifiers, stop-rayons, wobblers, vitrophanies, présentoirs en carton bois ou métal, arceaux de tête de gondole. Ils jouent sur la forme, la matière, la découpe et la couleur, parfois avec des finitions spécifiques comme le vernis sélectif, le gaufrage, ou des LED passives alimentées pile si l’on s’autorise une légère hybridation.
La PLV digitale regroupe les écrans et solutions actives: écrans LCD ou LED, tablettes sécurisées, étiquettes électroniques, players média pilotés à distance, capteurs de présence déclenchant une séquence, bornes interactives tactiles avec catalogue étendu, QR codes reliés à une expérience mobile, voire beacons s’ils sont exploités par l’enseigne. On y associe souvent un logiciel de gestion de contenus, une remontée de logs, et parfois de la mesure basique d’audience par capteur optique anonymisé.
Cette distinction n’est pas qu’esthétique. Elle touche à la chaîne logistique, au budget, aux compétences internes, à la tolérance du réseau à l’expérimentation, et au niveau d’exigence de l’enseigne en matière d’alimentation électrique, d’hygiène et de sécurité.
Coûts réels et coûts cachés
Sur une opération nationale, les chiffres racontent une histoire plus nuancée que les présentations commerciales.
Un lot de PLV carton pour 500 points de vente, totems, stop-rayons et kits de vitrine, se chiffre souvent entre 40 et 120 euros par magasin selon la complexité et les volumes. Le coût logistique pèse lourd, entre 15 et 35 % du budget, surtout quand on doit fractionner les envois ou gérer les retours. Le montage prend 10 à 30 minutes par équipe en magasin, parfois plus si les plans de montage sont flous. La PLV classique devient vite coûteuse si vous multipliez les vagues, car vous repaiez production, transport et temps d’installation à chaque itération.
La PLV digitale implique un investissement initial plus élevé par emplacement: un petit écran 10 à 15 pouces avec fixation sécurisée et lecteur média se situe rapidement entre 250 et 500 euros, hors installation. Ajoutez la main-d’œuvre pour la pose, le paramétrage, parfois une prise électrique à tirer, et un abonnement à une plateforme de gestion de contenus si vous ne passez pas par des clefs USB. Le ticket d’entrée est plus haut, mais la différence se rattrape si vous réutilisez le parc sur 3, 4 ou 10 campagnes, et si vous tirez parti de mises à jour à distance. Le coût caché, c’est la maintenance: batterie si l’on est en autonome, câbles arrachés, écran qui tombe en sommeil, droits d’accès perdus. Comptez une petite perte annuelle d’écrans, 3 à 10 % selon l’environnement et la sécurisation.
Dans les deux cas, le coût d’opportunité de l’inefficacité est souvent supérieur au coût matériel. Une PLV papier mal située, mal montée, à message confus, ne rapporte rien. Un écran allumé sans son, avec un contenu trop long, fait de la lumière mais pas du chiffre.
Efficacité: quand l’image bouge, le regard suit, mais pas toujours
Le mouvement attire. Une animation courte, claire et contrastée peut arracher le regard, gagner deux secondes d’attention et expliquer un bénéfice clé, par exemple le “zéro sucre, même goût” ou la “remise immédiate -20 %”. Sur des produits à forte saisonnalité ou sur une innovation, la PLV digitale rappelle l’usage, montre la texture, contextualise l’offre. Dans un corner beauté, un loop de 6 à 10 secondes, sans son, orienté portrait, peut faire la différence. Au-delà, on perd l’acheteur pressé.
Pour autant, l’imprimé garde un pouvoir immédiat sur la promotion. Une pastille prix, un stop-rayon “2 achetés = 1 offert” lisible à 3 mètres fait mieux que la plupart des vidéos pour déclencher un geste, car l’information prix doit être perçue instantanément, sans décodage. Les kits de vitrine imprimés, bien produits, offrent une couverture visuelle large à coût unitaire faible. Et dans les formats de magasin où la norme impose sobriété et sécurité, l’imprimé passe sans friction.
J’ai accompagné un lancement d’épicerie fine en GMS avec deux variantes: version A, simple tête de gondole avec totem carton et fronton prix; version B, même tête de gondole, mais écran 15 pouces en façade, boucles de 7 secondes montrant des recettes. Sur 60 magasins, la version B a surperformé de 14 % en volume, mais seulement là où l’écran était orienté vers le flux principal et où le contenu était mis à jour au moins une fois pendant la période. Dans les autres, l’écart tombait à 3 % ou devenait nul. L’enseignement tient moins à la technologie qu’à l’exécution de détail.
Contraintes opérationnelles et avis des magasins
Les magasins tolèrent ce qui leur simplifie la vie et fluidifie la vente. Un kit papier qui s’installe en 8 minutes, sans outils, avec gabarits clairs, a de bonnes chances de vivre. Un écran, même compact, doit être sécurisé, ne pas gêner le réassort, et disposer d’une source d’énergie fiable ou d’une batterie qui tient la journée. Les managers de rayon préfèrent des dispositifs qu’ils peuvent déplacer facilement lorsque le plan de masse change. Les centrales, elles, regardent la conformité au concept d’enseigne, l’impact visuel global, et le respect des chartes sécurité.
Si vous optez pour la PLV digitale, pensez au plan d’accès réseau: beaucoup de magasins n’autorisent pas les appareils tiers sur leur Wi-Fi. Il faut prévoir un player autonome, des mises à jour par 4G intégrée, ou des campagnes synchronisées par USB avec procédures simples et traçables. Sur 500 points de vente, la diversité des cas fait éclater les process trop sophistiqués.
La PLV traditionnelle a ses écueils bien connus: présentoirs bas qui se vident et ne sont pas rechargés, visuels froissés, supports qui s’affaissent. On les réduit par des matériaux plus rigides, des systèmes de verrouillage simples, et des pièces de rechange. Une équipe qui a le réflexe de photographier l’implantation finale et de remonter l’état des lieux via un formulaire gagne un bon 20 % d’efficacité dans la durée de vie des kits.
Mesure de performance: ce que vous pouvez réellement suivre
La PLV digitale promet la donnée. On peut suivre la diffusion des contenus, compter des déclenchements par capteur de présence, estimer un trafic de proximité. C’est utile, mais attention aux interprétations. Un écran peut afficher 40 000 boucles diffusées en 4 semaines, sans lien direct avec les ventes. Le meilleur indicateur reste la variation de sorties caisse ou de prises en main quand on peut l’estimer.
L’imprimé ne fournit pas de logs, mais il se mesure par des méthodes simples: magasins test versus témoins, avant/après, et relevés photo. Sur des périodes de 2 à 6 semaines, vous obtenez un signal fiable, à condition d’isoler les facteurs externes comme la météo sur les boissons fraîches ou les ruptures.
La sophistication des KPIs ne compense pas la variabilité du terrain. Une règle pratique qui fonctionne: fixez deux métriques de succès au maximum. Par exemple, uplift de ventes en unités et conformité d’installation. Si la conformité est inférieure à 70 %, réinterrogez l’ergonomie du dispositif avant d’accuser la création.
Durabilité, image et contraintes réglementaires
Le sujet environnemental pèse de plus en plus dans les arbitrages. La PLV papier, si elle est meilleurs presentoires produite en circuits courts, avec encres à faible COV et supports recyclés ou recyclables, présente un bilan acceptable, surtout pour des durées courtes. Les présentoirs carton intelligemment conçus, sans plastification inutile, se démontent et se trient facilement. L’impact se dégrade quand on multiplie les petites séries urgentes, transport express et sur-emballages.
La PLV digitale a un coût environnemental upfront, matériaux et énergie. Elle devient plus vertueuse si elle tourne sur plusieurs campagnes et si la consommation est maîtrisée: luminosité adaptée, extinction hors horaires, écrans à haut rendement. Certaines enseignes exigent désormais un plan d’écoconception: durée de vie visée du hardware, réparabilité, filières de reprise. Cela change la donne, car un parc bien géré amortit son empreinte sur plusieurs années.
Côté réglementation, les écrans doivent respecter les normes électriques et de sécurité incendie du réseau. En pharmacie ou en aéroport, les règles se durcissent. Les contenus, qu’ils soient imprimés ou digitaux, doivent respecter les contraintes de catégorie: allégations en cosmétique, alcool, santé. La PLV digitale facilite la mise à jour en cas de modification légale, là où l’imprimé oblige à reposer des supports.
Cas d’usage où l’une prend l’avantage
Pour un lancement national à forte rotation, en GMS alimentaire, avec une promo prix claire, la PLV imprimée reste un cheval de bataille. Elle déploie rapidement une couverture large, elle s’intègre aux process des équipes, elle marque visuellement un îlot ou une TG. Les touches dynamiques ne sont pas toujours nécessaires si le message est prix et que le facing est fort.
Sur des univers où l’explication d’usage ou la démonstration visuelle compte, high-tech, beauté, cuisine, la PLV digitale prouve son intérêt. Une séquence de 6 secondes montrant la mousse d’un soin capillaire ou la simplicité d’une cafetière compacte vaut mieux que trois lignes de texte. En rayon surgelé, un bandeau LED correctement étanchéifié attire sur une nouveauté que les portes vitrées et la lumière froide rendent sinon invisible.
Dans les formats éphémères, pop-up et événements, un mix est souvent optimal. Totems légers imprimés pour l’impact immédiat, petits écrans autonomes pour la preuve d’usage, QR code pour récupérer une adresse email avec une offre spéciale. L’objectif est de ne pas alourdir la logistique ni la dépendance à une connexion.
Budget, calendrier et gouvernance: les vrais arbitres
Le choix ne se fait pas en chambre, il se fait sur une équation simple: budget global, délai de préparation, maturité de l’enseigne et expertise interne pour piloter l’exécution.
Si vous avez moins de 8 semaines, peu de latitude technique en magasin, et un besoin de couverture large, partez sur de la PLV traditionnelle propre et bien pensée, avec un message court et des supports solides. Si vous avez un parc d’écrans existant ou des partenaires capables de déployer et maintenir rapidement, la PLV digitale devient une option crédible, à condition de verrouiller les contenus tôt et de prévoir un plan de secours en cas d’écran inactif.
La gouvernance compte autant que le matériel. Qui valide les contenus, qui pousse les mises à jour, qui appelle au magasin en cas de silence écran? Sans réponse claire, l’investissement dans le digital se dilue. Et côté imprimé, qui vérifie que le kit n’est pas parti à la benne derrière le quai? La discipline opère la différence entre un test prometteur et un investissement pérenne.
Création: règles simples qui évitent 80 % des erreurs
La création doit se plier à l’environnement réel. En imprimé, privilégiez les titres entre 3 et 6 mots, police lisible, contraste fort, un seul visuel principal, une preuve prix ou bénéfice explicite. En digital, pensez au rythme magasin: zéro son, sous-titres si besoin, plans serrés, boucles courtes, entre 6 et 10 secondes, et un premier plan qui affiche le message clé dès la première seconde. Les écrans horizontaux en allée fonctionnent mal quand les flux sont latéraux. Le portrait est souvent plus efficace sur des colonnes ou des têtes de gondole.
Évitez les appels à l’action qui renvoient sur un site non mobile. Si vous affichez un QR code, testez-le in situ sur place, à deux mètres, avec l’éclairage réel. Et ne négligez pas le hors-champ: câbles visibles, poussière sur écran, supports abîmés. Le consommateur lit l’ensemble, même inconsciemment.
À quel moment basculer vers un parc digital
Beaucoup d’enseignes et de marques commencent par des pilotes. Trois à cinq magasins par type, hyper et super, centre-ville et périphérie, un mois chacun, contre un groupe témoin. Au bout de deux à trois cycles, on dégage des règles. Si l’uplift moyen dépasse un certain seuil, 8 à 15 % selon la marge catégorie, et si la maintenance reste sous contrôle, 2 interventions par écran et par an au maximum, le business case s’installe. La réutilisation des écrans sur plusieurs opérations, et la possibilité de régionaliser les contenus sans reprint, font pencher la balance.
À l’inverse, si vos opérations sont très prix-courtes, “3 jours flash”, et que les magasins changent d’implantation chaque semaine, la souplesse et le coût marginal de l’imprimé restent imbattables. On peut viser l’excellence avec des kits standardisés, des gabarits éprouvés, et une logistique qui sait livrer D-2 sans casse.
Une grille de décision simple pour arbitrer
Voici un cadre de réflexion, pensé pour un décideur marketing ou trade qui doit trancher sans perdre du temps.
- Si votre message est principalement prix, immédiat, et doit couvrir large en moins de 6 semaines, privilégiez la PLV traditionnelle. Réservez le digital à quelques hotspots stratégiques. Si votre message exige une démonstration visuelle ou une pédagogie rapide, et que vous disposez d’au moins 10 semaines de préparation, investissez en PLV digitale sur des emplacements validés, avec contenus courts. Si vous menez 4 campagnes ou plus par an au même endroit, le digital devient économiquement intéressant, surtout avec des contenus mutualisés. Si vos magasins n’offrent pas d’accès électrique fiable ou refusent les connexions, les écrans sur batterie courte durée ou la PLV traditionnelle restent plus sûrs. Si la RSE pèse dans vos KPI, calculez l’impact par durée de vie: imprimé éco-conçu sur cycles courts, digital réemployé et bien paramétré sur cycles longs.
Erreurs fréquentes et correctifs rapides
L’erreur la plus courante en digital consiste à produire des vidéos trop longues, 20 ou 30 secondes, pensées pour les réseaux sociaux, puis à les transférer telles quelles en rayon. En magasin, personne ne regarde autant. Découpez en capsules, écrasez la première seconde avec le message clé, et oubliez le son.
Côté imprimé, on voit trop de textes en pavés, des bénéfices noyés dans des accroches créatives qui parlent à l’équipe créa mais pas au client. Un tri des messages et un shoot photo utile, pas seulement esthétique, règlent la plupart des problèmes.
Sur le déploiement, un kit sans plan de pose clair perd la moitié de sa puissance. Un QR code discret renvoyant vers une micro-vidéo d’installation peut faire gagner 5 minutes par magasin et améliorer la conformité. En digital, un monitoring basique, “écran en ligne / hors ligne”, remonte les pannes avant la fin de l’opération au lieu de les découvrir au reporting.
Exemple concret: une marque de soins, 120 pharmacies, 8 semaines
Brief: pousser un nouveau sérum à 39,90 euros, expliquer l’acide hyaluronique triple poids moléculaire, budget limité, 8 semaines de visibilité.
Option imprimée: fronton de comptoir, vitrophanie simple, stop-rayon comparatif. Coût unitaire environ 55 euros, installation en 12 minutes, couverture totale garantie. Uplift observé sur un test précédent: +18 % sur 4 semaines, avec baisse à +10 % en fin de période.
Option digitale: écran 13 pouces portrait sur présentoir, boucles de 8 secondes, avant/après, “-15 % lancement” animé, mise à jour à distance en semaine 4. Coût d’équipement initial environ 350 euros + pose, réutilisable. Uplift attendu: +20 à +30 % si l’écran plv fabricant reste actif, mais risque d’écran éteint dans 10 à 15 % des points.
Décision: mix. 80 pharmacies reçoivent imprimé seul, 40 pharmacies à fort trafic reçoivent écran + kit imprimé réduit. Les résultats ont montré +27 % sur le groupe digital mixé, +14 % sur l’imprimé seul, avec deux écrans inactifs détectés la première semaine puis remis en ligne. Au total, le business case plaidait pour un parc de 50 écrans pérennes sur le réseau, réutilisés ensuite pour deux autres campagnes dans l’année.
Où se loge la vraie valeur: dans l’orchestration
La PLV n’existe pas en vase clos. Elle amplifie les promos, elle guide l’équipe de vente, elle prolonge la campagne média. L’imprimé trace le cadre et donne la preuve immédiate. Le digital apporte le mouvement, la flexibilité, la capacité d’itérer. L’un sans l’autre peut fonctionner, mais leur combinaison apporte souvent un gain marginal là où les budgets sont serrés.
Pour décider, ne cherchez pas une vérité universelle. Cherchez une réponse opérationnelle adaptée à vos circuits et à votre calendrier. Établissez vos principes, testez sur un périmètre maîtrisé, puis industrialisez. Si votre organisation sait produire vite des kits papier robustes, exploitez ce savoir-faire. Si vous pouvez mettre en place un petit comité de pilotage contenu et un support technique réactif, le digital vous donnera un avantage sur la durée.
La PLV, digitale ou traditionnelle, reste un métier d’exécution. On gagne sur le terrain, pas sur la slide. Et au moment de choisir, posez-vous trois questions simples: mon message exige-t-il du mouvement, mon réseau peut-il opérer la solution choisie, et la courbe d’apprentissage me permet-elle de faire mieux à chaque campagne? Si la réponse est claire, le choix le sera tout autant.